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22 novembre 2006 3 22 /11 /novembre /2006 16:07
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Les sorties cinéma du mercredi 22 novembre
 

 

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22 novembre 2006 3 22 /11 /novembre /2006 16:00
 
La Belgique sous le choc d'un nouveau Vilvorde
LE MONDE | 22.11.06 |
BRUXELLES CORRESPONDANT


La direction du groupe Volkswagen (VW) a annoncé, mardi 21 novembre, qu'elle allait supprimer 4 000 emplois sur les 5 300 de son usine de Forest-Bruxelles. La production de la Golf, la voiture la plus vendue en Europe, dont 190 000 exemplaires sont sortis des chaînes belges en 2005, sera rapatriée sur les sites allemands de Wolfsburg et Mosel.

 

 
L'ex-président du comité d'entreprise arrêté

L'ancien président du comité d'entreprise de Volkswagen (VW), Klaus Volkert, a été arrêté, mardi 21 novembre, dans le cadre de l'affaire de corruption qui a ébranlé en 2005 le groupe allemand. M. Volkert est soupçonné d'avoir touché 1,9 million d'euros de pots-de-vin de la direction des ressources humaines de VW, qui désirait s'assurer la paix sociale dans l'entreprise. Il aurait par ailleurs aidé un dirigeant du service des ressources humaines, Hans-Joachim Gebauer, à monter un réseau de sociétés écrans pour décrocher de gros contrats avec VW, à l'insu du constructeur.


Après les mesures adoptées en Allemagne, "des sites supplémentaires doivent faire l'objet d'une restructuration afin d'atteindre une production compétitive dans les sites ouest-européens", a indiqué, mardi, la direction du constructeur.

"Je suis déçu que des considérations nationales aient constitué le fondement d'une telle décision et choqué, parce que tellement d'efforts avaient été accomplis pour faire de cette entreprise l'une des plus productives d'Europe", a indiqué le premier ministre belge, Guy Verhofstadt. Il a ajouté que la production est moins chère à Forest qu'à Wolfsburg, "ce qui prouve que le principe de marché n'a pas joué".

La décision annoncée par Reinhard Jung, président du conseil d'administration de VW-Forest, a eu l'effet d'un coup de massue. Elle pourrait signer l'arrêt de mort du site. Yves Leterme, président de la Région flamande, s'est dit "impuissant" face à ce que des journaux décrivent comme "une catastrophe nationale", plus grave que celle de Renault-Vilvorde, en 1997.

Charles Picqué, président de la Région bruxelloise, où le taux de chômage dépasse 20 %, a dit sa "consternation" face aux dégâts sociaux : 13 000 emplois au total pourraient être sacrifiés, notamment chez les sous-traitants.

Mardi après-midi, quelques centaines de travailleurs ont bloqué l'entrée de l'usine, brûlant un drapeau allemand et d'autres aux couleurs de la marque. Un grand ressentiment à l'égard des syndicats allemands s'exprimait : "Ils nous ont sacrifiés pour garder leur emploi après avoir accepté une augmentation de la durée de leur temps de travail", expliquait un syndicaliste de l'organisation chrétienne CSC.

 

"LE CHEMIN LE PLUS FACILE"

 

Fin septembre, VW a signé un accord avec le syndicat IG Metall prévoyant un allongement de la durée du travail hebdomadaire, en échange d'une garantie de l'emploi pour les salariés allemands (Le Monde daté 1er-2 octobre).

Une assemblée du personnel devait se tenir, mercredi matin à Forest. Les représentants syndicaux ont lancé des appels au calme, mais à la base on n'exclut pas "la guerre". Informés des difficultés qu'ont connues, avant eux, les travailleurs de Renault pour retrouver un emploi, les salariés de VW semblaient dubitatifs quant aux promesses d'aide formulées par les régions et le gouvernement fédéral. La Commission européenne a, elle, évoqué l'éventuel octroi de moyens financiers à la Région de Bruxelles.

Après avoir rencontré M. Verhofstadt mardi soir, les syndicats semblaient se réjouir qu'un front commun soit esquissé en vue de faire pression sur la direction allemande.

Les responsables belges espèrent que VW confiera à Forest la fabrication de l'un des nouveaux modèles qui sera lancé à partir de 2008. Les syndicats tablent, au mieux, sur le maintien de 2 000 à 2 500 emplois, à condition qu'un plan industriel et des investissements soient garantis.

M. Verhofstadt rencontrera la direction début décembre. "J'ai peu d'espoir, mais je veux tout entreprendre pour assurer un avenir à cette usine", a-t-il dit.

Selon la presse allemande, VW pourrait réduire aussi ses effectifs portugais et espagnols. "En raison des faibles coûts de production, le site portugais devrait être épargné", avance Jürgen Pieper, analyste de la banque Metzler, qui estime qu'en conservant ses capacités de production en Allemagne "VW choisit le chemin le plus facile".

Jean-Pierre Stroobants avec Cécile Calla (à Berlin)
 
La suppression de 4 000 emplois chez Volkswagen est vécue comme une catastrophe nationale en Belgique
LEMONDE.FR avec AFP | 21.11.06 |

La bourgmestre de Forest, près de Bruxelles, est allée à la rencontre des salariés de l'usine Volkswagen, mardi 21 novembre, après l'annonce de 4 000 suppressions de postes sur le site. | AFP/DIRK WAEM

 
La bourgmestre de Forest, près de Bruxelles, est allée à la rencontre des salariés de l'usine Volkswagen, mardi 21 novembre, après l'annonce de 4 000 suppressions de postes sur le site.

Après des semaines d'incertitude, le couperet est tombé, mardi 21 novembre, à l'usine Volkswagen de Bruxelles : la direction a annoncé la suppression de quelque quatre mille emplois, soit près des trois quarts de l'effectif. Dix ans après la fermeture brutale de l'usine Renault de Vilvorde et le licenciement de trois mille salariés, la Belgique a l'impression de revivre une nouvelle catastrophe nationale.

 

"C'est une catastrophe nationale, économique et sur l'emploi", a estimé la bourgmestre (maire) de Forest, Corinne de Permentier. Le premier ministre belge, Guy Verhofstadt, s'est quant à lui dit "déçu" que des "considérations nationales" aient motivé cette décision. "Cela me choque d'autant plus que tant d'efforts ont été consentis ces dernières années pour transformer cette implantation en l'une des plus productives d'Europe", a-t-il ajouté.

En Allemagne, la direction a confirmé qu'elle ne voulait maintenir que mille cinq cents emplois sur le site de Forest, près de Bruxelles. Elle a précisé que le modèle phare de l'usine, la Golf, produite chaque année à environ deux cent mille unités, ne serait plus assemblée à Forest mais seulement en Allemagne, à Wolfsburg, dans le nord, et à Mosel, dans l'est du pays. Outre la Golf, la Polo sort de l'usine belge, mais en quantités beaucoup plus réduites. Et elle n'en fabrique pas la tôlerie, importée de Bratislava (Slovaquie), puis peinte et montée à Forest.

ASSEMBLÉE GÉNÉRALE MERCREDI

Grâce à toute une série de mesures – dont l'annonce, cet hiver, de vingt mille suppressions de poste en Allemagne – la situation de Volkswagen s'est améliorée cette année, mais sa rentabilité reste défaillante. En septembre, les salariés allemands du constructeur ont accepté de travailler quatre heures de plus par semaine sans augmentation de salaire. En contrepartie, le puissant syndicat IG-Metall a obtenu que Volkswagen rapatrie une partie de la production en Allemagne. Un engagement qui concourt à expliquer les suppressions d'emplois à Bruxelles.

Selon la presse allemande, Forest pourrait n'être qu'un début, avant de nouvelles tailles dans les effectifs portugais et espagnols. Ces coupes claires devraient avoir un impact considérable sur l'emploi en Belgique, Volkswagen faisant travailler plus de dix mille personnes en sous-traitance.

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22 novembre 2006 3 22 /11 /novembre /2006 15:58
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20 novembre 2006 1 20 /11 /novembre /2006 17:07
Du grain à moudre
par Julie Clarini et Brice Couturier
du lundi au vendredi de 17h à 18h
  Du grain à moudre

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Podcast


 
 
émission du lundi 20 novembre 2006
Aujourd’hui, crise de la masculinité mais quelle crise ? L'homme est-il une femme comme les autres ?

 


  Vendredi et samedi derniers se déroulait à Paris un colloque sous l’égide de René Frydman et Muriel Flis-Trèves intitulé A quoi rêvent les hommes ? Bien qu’il se tint au muséum d’histoire naturelle, n’ayez pas d’inquiétude l’homme n’a pas (encore) été classé par les spécialistes de taxinomie dans les collections fossiles.
L’objet était sérieux : réfléchir à la nouvelle génération d’hommes qui émerge des bouleversements engendrés par les acquis du féminisme. Maintenant que les petites filles vont enfin pouvoir rêver de devenir Présidente de la République sans qu’on s’interroge sur leur santé psychique, les garçons vont-ils toujours aspirer à une carrière chez les sapeurs-pompiers ? Rien n’est moins sûr. C’est l’effet culbuto : si les femmes changent, les hommes aussi. D’ailleurs, c’est déjà fait : si l’on en croit l’opinion générale et quelques essayistes à la mode, les hommes ne sont plus ce qu’ils étaient. Même les psys attestent d’une crise de la masculinité sans précédent.
De nouveaux modèles émergent : vous connaissiez les « nouveaux pères », vous découvrirez le « métrosexuel », dont j’emprunte la définition à un journal qui s’y connaît : « un mélange de dandy et de gay mâtiné d'une pointe de «mac». Il se pomponne, redécouvre l'art du rasage, se met des crèmes sur le visage, et, comble, peut parfois se mettre un peu de vernis sur les ongles ». Waouh !
Mais ces constructions médiatiques positives ne doivent pas masquer les difficultés auxquelles sont confrontés les hommes dans un monde où le travail, lieu privilégié de la construction de soi, fait de plus en plus défaut et où l’expression des valeurs viriles y est stigmatisée comme ringarde.
Alors qui sont les nouveaux hommes ? Epanouis d’être enfin délivrés de l’injonction d’être « à la hauteur » ou au contraire en souffrance devant les nouvelles exigences qui se font jour ? La figure du Père est-elle obsolète ? Vivrons-nous bientôt dans une société où les rôles et les identités seront totalement redistribués ?

  Invités

 
Serge Héfez.  Psychiatre et psychanalyste. Hôpital de la Salpêtrière (service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent).

 
Muriel Flis-Treves.  Psychiatre et psychanalyste, attachée à la maternité de l'hôpital Antoine-Béclère. Enseignante à la faculté de médecine Paris XI.

 
Marc Bessin.  Sociologue à l'Ehess.

 
Christian Flavigny.  Psychanalyste à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière et pédopsychiatre à l'hôpital de Ville-Evrard.


 
 

 

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19 novembre 2006 7 19 /11 /novembre /2006 17:36
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18 novembre 2006 6 18 /11 /novembre /2006 12:48
 
Milton Friedman, Prix Nobel d'économie, est mort
LEMONDE.FR avec AFP | 16.11.06 |
L'économiste américain Milton Friedman, le 10 décembre 1976, jour où il reçut le prix Nobel d'économie. | AP
AP
L'économiste américain Milton Friedman, le 10 décembre 1976, jour où il reçut le prix Nobel d'économie.

Peu d'économistes ont fait naître autant de controverses. Milton Friedman, grand défenseur du libéralisme et Prix Nobel d'économie en 1976, est mort à l'âge de 94 ans, jeudi 16 novembre à San Francisco, a-t-on appris auprès du centre de recherche néolibéral Cato Institute, dont Milton Friedman fut l'un des inspirateurs.

 

 
Né à New York d'une famille d'immigrants juifs venus d'Ukraine, Milton Friedman a d'abord fait des études en mathématiques, puis en économie. En 1946 – l'année de la mort de John Maynard Keynes –, il obtient un doctorat en économie à l'université Columbia de New York.

Il était surtout connu pour avoir fondé, en 1948, l'école de Chicago, une équipe de purs et durs du libéralisme, qui inspira notamment la doctrine économique de plusieurs dictateurs d'Amérique latine. L'un des épisodes les plus controversés de sa vie reste d'ailleurs son voyage au Chili, en 1975, où il avait rencontré le dictateur Augusto Pinochet.

Il obtient la reconnaissance du grand public dans les années 1962-1964, lorsqu'il devient le grand inspirateur de la politique économique de Ronald Reagan, et, indirectement, de Margaret Thatcher.

CHANTRE DE LA PRIVATISATION ET DE LA FLEXIBILITÉ

Sa pensée s'articulait autour de quelques grands principes, au premier rang desquels l'idée selon laquelle l'inflation s'explique toujours par une augmentation de la quantité de monnaie en circulation. Dans cette optique, il professait un rôle limité de l'Etat en matière monétaire et jugeait inefficaces, voire nuisibles à long terme, les politiques de relance. Parmi ses idées controversées, il plaidait aussi pour une diminution des dépenses sociales de l'Etat-providence, une privatisation des entreprises publiques et une flexibilité de l'emploi et des salaires – voire la liberté de choix dans le domaine de l'éducation et la libéralisation de la drogue. En 1977, il était devenu le gourou de l'Institut Hoover à l'université de Stanford, en Californie.

"Milton Friedman a révolutionné la pensé économique dans le monde", a réagi Jamie Dettmer, du Cato Institute. "Si Keynes a dominé la pensée économique au milieu du XXe siècle, Friedman domine la pensée économique à la fin de ce siècle et il le fera à l'aube de ce nouveau siècle", affirme M. Dettmer.

Parmi les ouvrages les plus connus de cet économiste qui aimait à dire avec une pointe de provocation "s'il faut privatiser ou élaguer une activité publique, faites-le complètement", on trouve notamment La Théorie quantitative de la monnaie et La Tyrannie du statu quo.

Milton Friedman, qui, selon le Wall Street Journal, a succombé à une crise cardiaque à son domicile, était marié et père de deux enfants.

 

Milton Friedman, Prix Nobel d'économie 1976
LE MONDE | 17.11.06 |
 
L'économiste Milton Friedman, Prix Nobel d'économie 1976, est mort, le 16 novembre, à San Francisco, d'une insuffisance cardiaque. Il était âgé de 94 ans.

 

Quatrième enfant d'une famille d'émigrants d'Autriche-Hongrie, Milton Friedman est né le 31 juillet 1912 à Brooklyn. Il perd son père très tôt et sa mère doit faire face à d'énormes difficultés pour élever ses enfants. C'est pourquoi il concourt pour une bourse, qui lui ouvre l'université de Chicago.

 
Après son doctorat, il part à Washington travailler au comité qui préparait le New Deal, puis à Paris, comme consultant pour le plan Marshall. Mais c'est au cours des années 1960 qu'il est mis sur le devant de la scène, en devenant conseiller de Barry Goldwater, candidat républicain à la Maison Blanche. Il remplit la même fonction auprès du président Richard Nixon. Plus tard, il fera partie de l'équipe de Ronald Reagan.

Il commence sa carrière universitaire par des travaux de statistiques, mais préfère "se tourner vers un domaine plus spéculatif qu'utilitaire". Son désir est de démontrer que l'économie est une science empirique que l'on peut confronter à la réalité, et non une discipline subjective. Dans son ouvrage Essays in Positive Economics (1953), il affirme que, même si les hypothèses d'une théorie ne sont pas empiriquement vérifiées, il n'est pas justifié d'en conclure que cette dernière est inutile. Pour lui, la validité d'un modèle théorique dépend à la fois de sa cohérence interne et externe et elle doit être appréciée seulement en fonction de sa capacité de prédiction.

Ce raisonnement se retrouve dans La Théorie de la consommation (1957), que les économistes traditionnels considèrent comme son apport le plus important. Keynes avait montré que les ménages augmentaient leurs dépenses de consommation en fonction de l'accroissement de leurs revenus, mais d'un montant moindre. Pour Milton Friedman, ce point de vue était irréaliste, car "un individu ne prévoit pas ses dépenses d'une journée en fonction du revenu qu'il pense encaisser le même jour".

 

THÉORIE DE LA MONNAIE

 

En pratique, tout consommateur envisage ses dépenses à partir d'une estimation à plus long terme des ressources dont il pourra disposer. Il s'agit donc de prendre en compte un revenu permanent et non pas un simple revenu courant. Le concept de revenu permanent a permis de beaucoup mieux appréhender les évolutions de la demande de certains biens durables, comme le logement.

Le second domaine pour lequel Friedman est aujourd'hui universellement connu est la théorie de la monnaie. Au début des années 1950, plus personne ou presque ne s'intéressait au rôle de la monnaie dans l'économie. Mais l'inflation que l'on connut à cette époque suscita un grand nombre de recherches, et il apparut qu'il existait un lien entre la monnaie et l'inflation. C'est pourquoi Friedman entreprit de rénover la théorie quantitative qui mettait en évidence les relations entre la monnaie, les prix et les revenus.

Ainsi, lorsque la masse monétaire augmente plus vite que la quantité de monnaie que les agents économiques souhaitent détenir, ils s'efforcent de ramener leurs encaisses au niveau souhaité, soit par l'achat d'autres actifs, soit par le remboursement de dettes.

Si, au contraire, la masse monétaire n'augmente pas aussi vite que la demande de monnaie, les agents, pour maintenir le niveau de leurs encaisses, vendent d'autres actifs, ce qui exerce une pression à la baisse sur les prix. Ce raisonnement permet de comprendre pourquoi les monétaristes considèrent que la politique monétaire a une influence sur l'évolution à la fois de la production et des prix.

Au début des années 1960, Milton Friedman s'est penché sur "la courbe de Phillips", qui mettait en évidence une relation inverse entre le chômage et l'inflation. Cette découverte donna naissance à la politique de réglage fin (fine tuning), c'est-à-dire un arbitrage entre ces deux indicateurs de déséquilibre. Pour Milton Friedman et Edmund Phelps, Nobel 2006, il est illusoire de vouloir réduire le chômage par l'inflation. En effet, l'inflation entraîne une hausse des salaires, puis celle des prix et du chômage. Le choc pétrolier de 1974 a conforté ce point de vue puisqu'il y a eu à la fois inflation et chômage, c'est-à-dire stagflation.

Bien que soumis à des critiques souvent idéologiques, les travaux de Friedman ont éclairé d'un jour nouveau la science économique. Tenant de la non-intervention de l'Etat et de la libre entreprise, il a influencé toute une génération d'économistes, et ses conceptions ont conduit à la création d'une nouvelle école classique autour du principe des anticipations rationnelles, avec des économistes comme Muth, Lucas (Nobel 1995), Sargent ou Wallace qui le tiennent pour un maître incontesté.

Cet apôtre du libéralisme a su, certes, créer un véritable mouvement, mais, comme tout penseur engagé, il a aussi suscité des haines reposant souvent sur des idées reçues. Par exemple, lors de la remise de son prix Nobel, un participant hurla dans la salle "Vive le peuple chilien libre ! Friedman, go home !", parce que le général Pinochet disait s'inspirer de la pensée de Friedman et que ce dernier était allé passer une semaine en visite privée au Chili.

A Hanoï, la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, qui a dirigé l'Université Stanford, a indiqué vendredi avoir perdu "un grand ami, et le pays un leader intellectuel hors du commun". "Il était irrésistible, et l'un des êtres humains les plus intelligents que j'aie jamais rencontrés, mais il était drôle, chaleureux, a-t-elle poursuivi. Il me disait toujours : "Poursuivez toutes vos réformes". Il était super."

"Milton était l'un des grands penseurs et économistes du XXe siècle, et lorsque j'ai pour la première fois été en contact avec la puissance de ses écrits sur l'argent, les marchés dérégulés et la liberté individuelle, ce fut comme un coup de foudre", a pour sa part déclaré le gouverneur républicain de Californie, Arnold Schwarzenegger.


Dominique Roux est professeur à l'université de Paris Dauphine
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18 novembre 2006 6 18 /11 /novembre /2006 12:40
Critique
"Borat" : l'Amérique sous la moustache
LE MONDE | 14.11.06 | 16h32  •  Mis à jour le 14.11.06 | 16h32
L'acteur Sacha Baron Cohen dans le film américain de Larry Charles, "Borat, leçons culturelles sur l'Amérique au profit glorieuse nation Kazakhstan" ("Borat"). | 20TH CENTURY FOX FRANCE L'acteur Sacha Baron Cohen dans le film américain de Larry Charles, "Borat, leçons culturelles sur l'Amérique au profit glorieuse nation Kazakhstan" ("Borat").

20TH CENTURY FOX FRANCE


Pauvre petit (2,7 millions de kilomètres carrés) Kazakhstan. Que peut-il faire face à l'agression d'un terroriste isolé ? Sous le nom de Borat Sagdiyev, le comédien britannique Sacha Baron Cohen s'est abattu sur l'ancienne république soviétique, laissant la réputation du pays dans un état lamentable. Dans le film Borat, il ridiculiserait le Kazakhstan. Les autorités ont réagi avec fureur, condamnant le film sans l'avoir vu et encore moins compris. Eût-il été cinéphile ou doué d'humour, Noursoultan Nazarbaev, le président du Kazakhstan, se serait rendu compte que Borat, s'il ravale son pays au rang de faire-valoir comique, a pour véritable cible les Etats-Unis d'Amérique, objet d'une satire à la fois furieuse et précise, enveloppée d'un humour d'une universelle incorrection.

 

Les quelques séquences qui ouvrent Borat permettent de faire la connaissance du journaliste kazakh, ou prétendu tel, de sa ville de Kuzcek et de son environnement familial et professionnel. On découvre un garçon moustachu comme l'était le défunt Freddie Mercury (il se vante d'avoir été classé parmi les premiers lors d'un concours de sosies du chanteur de Queen), dont le regard évoque la lubricité enfantine d'Harpo Marx.

Le Kazakhstan de Borat (tourné en Roumanie) a un petit air des Balkans plutôt que d'Asie centrale. Les traits des figurants sont un concentré d'arriération (ils viennent d'abroger la mesure qui obligeait les homosexuels à se vêtir en bleu), de cruauté gratuite (Borat tient son frère, handicapé mental, enfermé dans une cage) et d'antisémitisme frénétique : chaque année, la ville procède à un "lâcher de juif", dans lequel une marionnette caricaturale tient la place dévolue aux taureaux à Pampelune. Rien à voir avec le Kazakhstan, mais avouons que ce délire provocateur serait moins drôle si Sacha Baron Cohen avait prétendu venir de Syldavie. La nationalité de Borat procède aussi de la nécessité : il s'apprête à partir en reportage aux Etats-Unis.

Sous ses dehors vidéo pas bien nets, Borat - le film - réussit un exploit de mise en scène et de montage. Le raccord entre le long prologue "kazakh" et le périple américain de Borat, le journaliste, passe comme une lettre à la poste.

 

EN CAMIONNETTE DE GLACIER

 

Pourtant, en traversant l'Atlantique, le film change de nature. De la fiction provocatrice, Sacha Baron Cohen et son metteur en scène Larry Charles passent à une forme de cinéma du réel, importée de la télévision. De vrais citoyens des Etats-Unis, croyant avoir affaire à une exotique équipe de tournage, se prêtent à leur insu à l'entreprise subversive de Sacha Baron Cohen. Ainsi, à peine arrivé dans le métro new-yorkais, Borat en met à l'épreuve les usagers, tentant de les embrasser sur les deux joues, laissant un poulet vivant s'échapper de son attaché-case.

Ce sont des jeux d'enfant comparé à ce qui va suivre. Accompagné de son producteur, Azamat Bagatov (Ken Davitian), l'Albert Londres de l'Oural gagne la Californie, saisi d'une envie irrépressible de faire la connaissance de Pamela Anderson. Comme Borat refuse de prendre l'avion, tenaillé par la crainte que "les juifs ne rééditent leurs attaques du 11-Septembre", il traverse l'Union d'est en ouest dans une camionnette de glacier.

En chemin, il se voit conseiller de se raser la moustache, "pour ne pas ressembler à un musulman", par l'organisateur d'un rodéo en Virginie. Il fait acclamer par une foule de cow-boys urbains, réunis pour l'occasion, la politique du président George W. Bush, qui va, dit-il, "boire le sang de chaque homme, femme et enfant d'Irak". Et, un peu plus loin à l'ouest, convainc un armurier de lui vendre l'instrument adéquat pour "tirer des juifs".

Chacune de ces séquences a requis la coopération involontaire des victimes de Borat. Donc sa démonstration est irréfutable : à chaque fois qu'il se penche sur un rituel ou un travers américain, il en révèle les codes et l'inconscient dans un éclat de rire teinté d'incrédulité. Comment ose-t-il, comment va-t-il s'en sortir vivant ? S'il est un film dont on aurait aimé voir le making of, c'est bien celui-là.

Mais Borat n'est pas seulement une machine de guerre satirique. En se limitant à ces attaques vicieuses contre l'American way of life, Sacha Baron Cohen et Larry Charles risquaient de casser les oreilles à force de stridence, aussi justifiée soit-elle. Heureusement, le film ne perd pas les vertus burlesques qu'il a déployées pendant son prologue kazakh.

Le meilleur exemple en est un match de catch entre Borat et son producteur obèse, moment d'une obscénité et d'une absurdité à faire pendre les mâchoires inférieures les mieux accrochées. La mise en scène de Larry Charles, déguisée en reportage télévisé raté, est assez précise pour que le film ne faiblisse jamais et reste à la hauteur de l'énergie délirante et délétère qui émane de Borat Sagdiyev.


Film américain de Larry Charles avec Sacha Baron Cohen, Pamela Anderson. (1 h 24).
 
Le faux Kazakh et ses victimes
LE MONDE | 14.11.06 | 16h32
L'acteur Sacha Baron Cohen (au centre) dans le film américain de Larry Charles, "Borat, leçons culturelles sur l'Amérique au profit glorieuse nation Kazakhstan" ("Borat"). | 20TH CENTURY FOX FRANCE L'acteur Sacha Baron Cohen (au centre) dans le film américain de Larry Charles, "Borat, leçons culturelles sur l'Amérique au profit glorieuse nation Kazakhstan" ("Borat").

20TH CENTURY FOX FRANCE


Pour la deuxième semaine consécutive, Borat domine le box-office américain. La performance est d'autant plus remarquable que ce film, lors du week-end qui a suivi sa sortie, était visible dans 837 salles, ce qui est très modeste pour le continent américain.

 

Le film, distribué par la Fox de Rupert Murdoch, a quand même rapporté plus de 25 millions de dollars en une semaine alors que le deuxième du classement, la comédie familiale The Santa Clause 3, pourtant distribué à 3 458 exemplaires, ne rapportait que 19,5 millions de dollars. Pour la seconde semaine, la Fox a largement étendu le circuit de salles, et Borat a récolté 29 millions de dollars, portant le total des recettes à 68 millions de dollars.

Il faut dire que, depuis sa présentation spectaculaire au Festival de Toronto (Borat Sagdiyev était arrivé à la première dans une charrette tirée par des paysannes légèrement vêtues), le film, dont le sous-titre exact est Leçons culturelles sur l'Amérique pour profit glorieuse nation Kazakhstan, n'a pas quitté les médias américains. Malgré la réticence de Sacha Baron Cohen, qui n'a accordé d'interviews que sous les oripeaux de Borat, on a pu ainsi se faire une idée des circonstances qui ont présidé à la réalisation du film.

Dans son édition du 16 octobre, l'hebdomadaire Newsweek a retrouvé quelques victimes américaines de Borat. Toutes ont raconté avoir eu affaire à un journaliste kazakh qui les a chichement dédommagées de leur temps et fait signer au dernier moment des documents léonins. Le vendeur d'automobiles d'occasion auquel le journaliste kazakh demande s'il peut lui fournir une voiture munie d'un "aimant à chattes" (pussy magnet) se plaint de n'avoir perçu que 150 dollars pour trois heures de son temps.

 

CONSENTEMENT SOUS IVRESSE

 

Ce vendeur de voitures, comme les autres intervenants du film - professeur de savoir-vivre ou d'humour, organisateur de rodéos, pasteur pentecôtiste ou représentant républicain -, a signé un formulaire dans lequel il renonçait à toute procédure même en cas de "fraude (y compris tromperie ou surprise quant à la nature du film)".

Mais il en faut plus pour empêcher un citoyen des Etats-Unis de se rebeller. Le premier procès, parmi les victimes du faux Kazakh, est venu de deux des étudiants de l'université de Caroline du Sud que l'on voit prendre Borat en auto-stop dans leur camping : ils ont fait valoir que leur consentement leur avait été arraché alors qu'ils étaient ivres. Leur avocat, cité sur le site de la publication hollywoodienne Variety, affirme que l'"on voit bien dans le film que l'un d'eux peut à peine garder les yeux ouverts". Sans préjuger du verdict, convenons que la valeur juridique de l'argument est à la hauteur du film.

Pendant ce temps, la censure en Russie, saisie d'une considération inattendue pour les populations originaires du Caucase, a découragé le distributeur de Borat d'acheminer ses copies jusqu'aux salles du pays. En revanche, le Kazakhstan, après bien des tergiversations, a déclaré que le film était une plaisanterie.

Thomas Sotinel
 
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18 novembre 2006 6 18 /11 /novembre /2006 12:31
Questions d'éthique
par Monique Canto-Sperber
le samedi de midi à 12h30
  Questions d'éthique

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Podcast


 
 
émission du samedi 18 novembre 2006
Les valeurs de la gauche

 

  Invité : Alain Bergounioux

L’Europe et les socialistes français :
une perspective historique

Alain Bergounioux


Document rédigé par Alain Bergounioux, secrétaire national à la Communication (4 novembre 2004)
 
Les socialistes français ont joué un rôle déterminant dans le processus de la construction de l’Europe. Ils ont été jusqu’à aujourd’hui présents aux grands rendez-vous, 1948 au Congrès de La Haye, 1957 pour les deux Traités de Rome, 1984 pour la relance européenne, 1992 pour le Traité de Maastricht, et, je l’espère, demain, pour la Constitution européenne  Léon Blum, Guy Mollet et François Mitterrand ont été tous les trois des européens convaincus. Mais cette histoire n’a pas été linéaire. Elle a été marquée à certains moments par de vifs débats. Les choix européens ont toujours été le produit d’une lutte de convictions.
     
L'internationalisme au cœur du choix européen des socialistes
    L’internationalisme a fait d’emblée partie de l’identité socialiste. Celui-ci portait une espérance de paix. Ce fut le sens de l’engagement des socialistes d’avant 1914, au premier rang desquels Jean Jaurès. Mais ce ne fut qu’après 1918 que l’Europe en tant que telle entra dans les préoccupations des socialistes. L’unité du continent aurait permis d’éviter le retour de la guerre. Léon Blum, en 1927, fut un des Présidents de la section française du Mouvement pan européen. Mais la différence des régimes politiques, les uns autoritaires, avec déjà l’Italie fasciste, les autres démocratiques rendait difficile de réaliser cette idée. De toute manière, à partir de 1933, il ne pouvait plus en être question.

    C’est pourtant au cours des années noires, celles de l’occupation, que l’idée européenne allait reprendre vie - et, pour cette fois, s’affirmer durablement. Là encore, Léon Blum joua un rôle majeur pour donner une perspective aux socialistes en acclimatant la notion de « délégation de souveraineté » pour désormais penser un au-delà de l’Etat-nation. Au Congrès de La Haye, celui du Mouvement européen, tous les socialistes, les nouveaux majoritaires depuis 1946, derrière Guy Mollet et les nouveaux minoritaires, avec Léon Blum, adhèrent aux thèses fédéralistes. André Philip fut un des principaux animateurs du Comité pour les Etats-Unis socialistes d’Europe. La première idée d’une Communauté européenne du Charbon et de l’Acier germa dans ce mouvement - et fut reprise ensuite par Jean Monnet.

    Pour Léon Blum comme pour Guy Mollet ensuite, l’internationalisme à joué un rôle majeur dans leur détermination européenne : l’Europe était perçue par eux comme la première étape d’une organisation du monde, d’une construction de la « Communauté universelle » comme disait Léon Blum. Les socialistes se trouvèrent dès lors devant une question décisive : le socialisme était-il ou non un préalable à la construction européenne ? Leur réponse fut quasi-unanimement, l’Europe avant le socialisme, l’Europe comme un chemin vers la réalisation des valeurs socialistes.

    Cette conviction venait (déjà) de la conscience de l’impossibilité de mener une politique socialiste « dans un seul pays ». Le Manifeste de 1950 des socialistes proclamait qu’« en dehors de l’unité européenne, il n’est point de salut pour la Paix, la Liberté  et la prospérité des peuples ». Évidemment, cet engagement dans la construction européenne justifiait aussi l’action politique menée de 1947 à 1951, puis de 1956 à 1958 dans des gouvernements de « troisième force ».

    Ce qui divisa les socialistes à partir de 1952 jusqu’en 1954, fut le Traité de la Communauté Européenne. Ce qui était en cause ne fut pas le principe de la construction européenne mais le problème du réarmement allemand quelques années après la fin de guerre. L’hostilité d’une moitié du groupe parlementaire fit échouer la ratification du Traité. L’unité de la SFIO se retrouva néanmoins aisément pour la relance européenne de 1956, sur les bases d’une Europe économique, qui a abouti aux deux Traités de Rome, l’année suivante, sur le Marché commun et l’Euratom.

    La difficulté pour les socialistes avec la Vème République vint de ce que cette première étape de la Construction européenne transcendait la distinction entre la gauche et la droite qui allait revenir en force en France dans les années soixante, installait l’économie de marché en son cœur, avec, il est vrai la présence de politiques communes, alors que la SFIO - mais encore moins le PSU, n’avaient pas admis dans la doctrine son principe.
L'Union de la gauche et la question européenne
    Le Parti socialiste, refondé en 1971 au Congrès d’Epinay sous la direction de François Mitterrand, procéda à une inversion des priorités, le socialisme en France redevenait l’objectif central. L’enjeu européen changeait de nature. Alliance oblige avec le Parti Communiste autour du Programme commun de Gouvernement, le souci était que l’Europe n’empêche pas le déroulement d’une expérience socialiste en France. François Mitterrand, lui-même foncièrement européen, maintint une ligne médiane entre la ligne antérieure de la SFIO et celle que préconisait une partie des socialistes., en particulier le CERES de Jean-Pierre Chevènement, mais aussi une partie de son propre courant derrière Pierre Joxe, fort critiques vis-à-vis d’une « Europe libérale ».

    François Mitterrand reprit à son compte le mot d’ordre « l’Europe sera socialiste ou ne sera pas ». Mais il appelait néanmoins à poursuivre la construction européenne. Lorsque le CERES voulut mettre fin à cette ambiguïté, il se décida au combat au sein du Parti. Un Congrès extraordinaire sur l’Europe se tint à Bagnolet en décembre 1973. Pour François Mitterrand, la construction européenne devait être poursuivie « sans délai ni préalable ». Il appelait de ses vœux une « Europe en marche vers le socialisme ». Les formules étaient inacceptables pour le CERES qui voulait rompre avec une réalité européenne « germano-américaine ». La France socialiste devait se construire contre « l’Europe des marchands et les financiers ».
    Pour dramatiser l’enjeu, François Mitterrand remit en jeu son mandat de Premier secrétaire. Sa victoire laisse néanmoins subsister des ambiguïtés, les préoccupations des socialistes dans cette décennie portant  avant tout sur la politique intérieure et les rapports avec le Parti communiste. Exclue de la majorité du PS en 1975, le CERES profita de la confrontation entre Michel Rocard et François Mitterrand  pour reprendre de l’influence. En 1979, le PS refuse de signer une plate forme commune avec les autres partis socialistes européens. Le projet socialiste de 1980 appelait à une stratégie de rupture avec le capitalisme indépendante des engagements français vis-à-vis de l’Europe. Les socialistes arrivèrent donc au pouvoir en 1981 avec une réflexion quelque peu contradictoire sur la construction européenne.
1983 : le tournant
    Le tournant clef intervint au printemps 1983 quand il fallut choisir de poursuivre  la politique menée depuis 1981 au prix d’une sortie du système monétaire européen ou de la modifier profondément pour ne pas isoler la France dans une économie mondiale fortement compétitive. Le Parti était divisé et méfiant. Le Gouvernement et apparemment François Mitterrand ne l’étaient pas moins. A côté des contraintes monétaires immédiates cependant, il est permis de penser que parmi les éléments qui pesèrent fortement pour le maintien du choix européen, l’attachement de François Mitterrand et de Pierre Mauroy à la construction européenne joua un rôle décisif. A partir de cette date, l’Europe allait à nouveau constituer une priorité et une finalité revendiquée par les socialistes. Ils adoptèrent un discours nouveau sur l’Europe, permettant de donner une vision socialiste de la construction d’une Europe non plus « socialiste », mais différente cependant de celle revendiquée par les libéraux. Le nouvel objectif fut d’éviter la dilution de l’Europe dans un simple zone de libre-échange, et dans cette perspective , la notion d’Europe politique retrouva son sens pour les socialistes, l’Europe sociale devenant le nouveau but.

    La signature de l’Acte Unique, en février 1986, qui accrut les aspects libéraux de la construction européenne, conduisit François Mitterrand et les socialistes à présenter l’Europe politique comme une nécessité permettant de contrebalancer les effets futurs de l’ouverture du marché unique de 1993. En 1987, Laurent Fabius appela le Parti socialiste à être « le premier parti européen ». Jacques Delors, à Bruxelles, tout en étant l’artisan principal de la mise en oeuvre du marché unique, se fit le champion des politiques communautaires.

    Les progrès de la construction européenne apparurent cependant lents aux socialistes. La Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux adoptée lors du Conseil européen de Strasbourg, en décembre 1999, n’évoquait plus l’harmonisation des législations en matière de protection sociale, laissait chaque pays agir en fonction de sa situation propre. Sans engager réellement dans ces années le débat Fédération-Confédération, les socialistes voulurent réfléchir en termes de « puissance publique européenne », appliquant ainsi les schémas français portées à préférer une action centralisée et volontaire. Quoiqu’il en fut, la dimension européenne de la pensée socialiste devint une donnée désormais incontournable.
1992 : le choix de Maastricht
    Avec le Traité de Maastricht, en 1992, l’enjeu européen prit une importance qu’il n’avait jamais eu dans la vie politique. La réunification de l’Europe, retrouvant « sa géographie et son histoire » avait persuadé François Mitterrand qu’il fallait accélérer le cours de la construction européenne. « Tout repli sur nous-mêmes serait fatal », disait-il en mai 1991. Le Parti socialiste reprit cette urgence dans son projet de décembre, au Congrès de l’Arche : « l’Europe constitue l’espace pertinent pour mieux maîtriser l’avenir ». Cette évolution rencontra l’opposition résolue de la minorité anti-européenne, le CERES, qui se transforma en 1992, en Mouvement des Citoyens, fit campagne pour le non et finit par quitter le PS en 1993 pour défendre principalement l’indépendance nationale.

    A partir de Maastricht, qui fut ratifié à une courte majorité, les socialistes ont été placés devant la tâche de définir une politique européenne cohérente. Nous sommes entrés en effet depuis cette date dans la période historique qui est la nôtre jusqu’au Traité constitutionnel de Bruxelles, signé désormais par les Chefs d’Etat et de Gouvernement à Rome, le 27 octobre, qui en sera peut-être la conclusion provisoire.

    Le Parti socialiste a été confronté à des questions qui n’avait jamais vraiment été traitées. Il est  possible d’en distinguer quatre principales : quelles institutions pour l’Union européenne, quelle place pour l’Etat nation, quelles relations avec les pays européens candidats à l’adhésion à l’Union, quel contenu social ?

    Jusque là, le choix fédéral ou confédéral n’avait pas été abordé de front et les mots étaient employés sans signification véritable. Le projet de l’Arche paraissait opter pour une perspective fédérale : « l’Union politique renforcera dans une finalité fédérale l’identité de la communauté actuelle en jetant les bases d’une véritable citoyenneté européenne, en renforçant sa légitimité démocratique et en lui permettant de mener, la ou ses intérêts l’exigeront une politique commune en matière économique, de relations extérieures et de sécurité ». Mais, la dynamique mise en œuvre pour la négociation du Traité de Maastricht et des traités qui ont suivi jusqu’à celui de Bruxelles a donné au Conseil européen, aux gouvernements et aux chefs d’Etat, un rôle déterminant. « Le Conseil européen doit être à tout moment en mesure de parler au nom de l’Europe après avoir consulté les opinions nationales », déclarait François Mitterrand un mois avant le référendum de Maastricht. L’ordre institutionnel européen a fonctionné alors selon deux logiques distinctes, d’un côté, les affaires de l’Union avec des compétences régulièrement mais prudemment élargies continua d’être réglées dans le cadre d’un triangle institutionnel, le Conseil, la Commission, le Parlement, de l’autre, le rôle clé du Conseil européen demeurant déterminant.

    En France, face aux souverainistes, influents à droite et à gauche - sans parler de l’extrême droite tout entière anti-européenne - les socialistes ont défendu le concept de subsidiarité, une conception prudente des transferts de souveraineté-excepté sur la monnaie unique. La place particulière des intérêts agricoles l’explique partiellement. Le Gouvernement de Pierre Bérégovoy n’hésite pas à en appeler à « l’Union nationale » pour défendre l’agriculture française dans les négociations du GATT, organisation qui a précédé l’OMC. Pour résoudre cette difficulté, la perspective fédérale coïncidant avec la défense des intérêts français, François Mitterrand et ses successeurs à la tête du Parti et au Gouvernement, firent du maintien de la cohésion du couple franco-allemand l’élément fondamental de la construction européenne.

    Les socialistes français ont clairement demandé qu’un approfondissement institutionnel de l’Union européenne précède l’élargissement aux anciens pays de l’AELE et aux pays de l’ancienne Europe de l’Est. François Mitterrand et les socialistes tout au long des années 1990 furent cependant entraîné par l’Allemagne et l’Angleterre  à abandonner cette exigence et à tenter de rendre simultanés l’approfondissement et l’élargissement. Ce pragmatisme se retrouva dans la construction de l’Europe sociale. L’adoption de la monnaie unique passa par l’acceptation du principe de l’indépendance’ de la Banque Centrale Européenne. La définition d’une charte des droits fondamentaux donna lieu à d’âpres négociations - notamment avec l’Angleterre - pour finalement être partie prenant du Traité constitutionnel.

    Ces difficultés - inévitables dans la mesure où l’Union européenne a été la résultante de compromis entre pays, avec leurs histoires, leurs cultures et leurs intérêts faites de longues négociations et d’équilibres successifs - expliquent qu’avec Lionel Jospin les socialistes aient repris un temps la notion, proposée par Jacques Delors de Fédérations d’Etats-Nations : « fédération - comme le fixait le Parti socialiste dans sa Convention de mars 1996 - car beaucoup de décisions y seront prises à la majorité, d’Etats  Nations car la fédération ne s’occupera que de ce qui est d’intérêt commun et devra préserver les identités de ses membres ». Après 1997, les divisions de la gauche plurielle, - avec un PCF et un MDC résolument euro-critiques et des verts plutôt pro-européens - amenèrent Lionel Jospin à maintenir cette position face même au discours audacieux de Joscha Fischer, réclamant en 2000 une fédération pour l’Europe. Celle-ci trouva plus d’écho au Parti socialiste qui affirma un engagement plus fédéral qui fut confirmé par le Congrès de Dijon en mai 2003. En même temps, l’idée déjà formulée depuis quelques années par Jacques Delors d’une avant garde européenne pour avancer plus vite, fut explicitement adoptée.
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16 novembre 2006 4 16 /11 /novembre /2006 18:48

 

Bandes-annonces

  

Bande-annonce 1 - Anglais sous-titrée

 

Bande-annonce 1 - Français

 

 

Politiquement incorrect, ce film-ovni à l’humour salace révèle avec audace les travers de l’Amérique.

Se munir, à l’orée de cette critique, d’un paratonnerre protecteur : en effet, placer Borat, une méchante comédie qui tache, en tête des films de la semaine, louer haut et fort une œuvre qui n’hésite pas à taper en dessous de la ceinture – devant et derrière –, porter au pinacle une fantaisie contenant une séquence de poursuite digne des grands burlesques muets, sauf que les participants sont à 100 % nus et à 50 % obèses, voilà qui suscitera des réactions indignées… A tort : car Borat, mis en images par Larry Charles, mais conçu et exécuté par l’humoriste anglais Sacha Baron Cohen, est le film le plus hilarant, le plus décapant, le plus irrésistiblement audacieux de l’automne.

Tâchons d’expliquer la chose : d’abord, dire qu’il s’agit d’un faux documentaire burlesque (les Anglo-Saxons appellent ça un « mockumentaire ») racontant le voyage aux Etats-Unis de Borat Zagdiyev, reporter en provenance du Kazakhstan, ex-république soviétique d’Asie centrale. Notre héros – belle prestance, moustache comme on en porte en Bordurie, pour citer un pays limitrophe façon Hergé – est chargé de dévoiler à ses compatriotes les us et coutumes américains. D’où le sous-titre du film : Leçons culturelles sur l’Amérique pour profit glorieuse nation Kazakhstan, excusez le charabia. C’est dans le même mauvais français (anglais en VO) que Borat commence par nous présenter son pays. D’emblée, on quitte la contrée du bon goût : car ce Kazakhstan-là est une sorte de bidonville géant façon Temps des gitans, où les automobiles sont traînées par des chevaux, où la moitié du pays fornique avec l’autre en buvant de l’urine fermentée, et où l’on pratique le « lâcher de Juifs », sur le modèle d’une feria méridionale. Il faudrait être sot, ce qu’ont été les autorités kazakhes courroucées, pour prendre au pied de la lettre ce portrait d’un pays quasiment resté à l’âge de pierre. Le « politiquement correct » mondialisé interdirait-il désormais de citer une nation en particulier ?

C’est que Borat, voilà sa force et sa fonction premières, dynamite le politiquement correct, fait joyeusement ce qui ne se fait pas. Prenez le « lâcher de Juifs ». Dans ce Kazakhstan imaginaire, l’antisémitisme est un sport national. Arrivé aux Etats-Unis, Borat affronte, et c’est peut-être le clou du film, un couple de logeurs juifs (deux petits vieux inoffensifs) qu’il croit capables de se métamorphoser nuitamment pour venir l’occire et lui piquer son pognon. Montrer l’antisémitisme comme une superstition stupide, un accès de bêtise crasse et dangereuse, ce n’est pas jouer avec le feu, mais remettre à sa juste place un sentiment qui ne se porte que trop bien par les temps qui courent.

Borat, film politique ? Evidemment. Son auteur montre en fait la contre-attaque galopante de l’obscurantisme. Une partie du périple américain est faite en caméra volée ; les interlocuteurs de Borat croient vraiment parler à un journaliste kazakh, et ce qu’ils révèlent de leur pays fait frémir : un rodéo où l’on se félicite que Bush « boive le sang des Irakiens » ; une assemblée évangéliste dont les membres n’ont pas l’air moins cinglés que nos Kazakhs d’opérette. Et un dîner BCBG où Borat pourrait, dixit une convive, être rapidement « américanisé » s’il n’avait la fâcheuse habitude d’apporter ses étrons à table ; des marchands d’armes et d’autos prêts à tout pour faire affaire… Cette Amérique-là ne surprend plus, mais effraie toujours. Michael Moore lui-même a « adoubé » Borat au dernier festival de Toronto.

La satire serait plate si elle ne s’accompagnait de trouvailles comiques permanentes. Le rire selon Borat dérape vers l’absurde – à forte tendance salace, mais pas seulement. Notre homme prend l’ascenseur de l’hôtel pour sa chambre, et en loue la vastitude. Il garde une poule dans sa valise, et hérite d’un ours, bestiaire ambulant. Il tripatouille le langage, dit d’une militante féministe (le féminisme est inconcevable pour Borat) qu’il ne comprend pas « ce que dit ce vieil homme ». On a rarement vu un personnage afficher avec une telle arrogance un tel concentré de stupidité. Les deux butent sur la stupidité et l’arrogance du monde, et les dénoncent. Cela s’appelle du grand art.

Aurélien Ferenczi
Télérama n° 2966 - 18 Novembre 2006
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13 novembre 2006 1 13 /11 /novembre /2006 13:29

Par Arthur Cagniot le 19 mars 2006

Les premières perspectives d’une sortie de la crise pétrolière se profilent : BMW devrait lancer l’année prochaine une version de sa limousine, la Série 7, équipée d’un V12 pouvant fonctionner soit à l’hydrogène, soit au super sans plomb. Depuis la fin des années 70, BMW s’est penché sur l’hydrogène et la commercialisation d’un modèle possédant ce mode de carburant constitue une avancée inégalée. Il est certain que ces modèles restent expérimentaux et qu’ils seront suivis par des ingénieurs de la marque mais mettre une 760Lh dans la rue témoigne tout de même d’un certain optimisme quant à la fiabilité.

Le V12 n’utilise pas le principe réutilisé de la pile à combustible que les autres constructeurs emploient mais un système de bi-carburation. Au final, une 760Lh est plus proche d’une 760Li qu’une Mercedes Classe A F-cell ne l’est d’une A200, ce qui n’est certainement pas sans incidence sur les coûts de production. Les 230 Cv de la version "H" paraissent légers face aux 440 cv de la version classique mais les ingénieurs munichois préciser que la puissance augmentera au fil de la mise au point. Le concept car H2R, qui a remporté de nombreux records de vitesse dans la catégorie hydrogène développait 285cv.

Evidemment, vous allez me dire : Ok, j’ai une voiture à hydrogène, mais je fais le plein où ? Chez Total ? Justement, oui. Le Clean Energy Partnership (CEP) allemand réunit toutes les entreprises de la chaîne de valeur pour développer l’utilisation de l’hydrogène. Aral, BMW, Berliner Verkehrsbetriebe (BVG) (ndlr : la RATP locale), DaimlerChrysler, Ford, GM/Opel, Hydro, Linde, TOTAL sont autant de partenaires précieux pour éprouver cette technologie.

Dominique Perben a essayé la voiture en préalable au sixième conseil des ministres franco-allemands. Espérons que ça puisse donner des idées au gouvernement et aux constructeurs français.

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